Sous-titré : à l’usage de ceux qui veulent vraiment changer le monde.
Edité chez Syllepse 7 €, 142 p.
Désobéissance et violence
Le cercle Jean-Barrué n’a pas fait le choix, unanimement, de la désobéissance civile ou de la non-violence active. Actuellement, il soutient pourtant une action de boycott des produits israéliens ; action entreprise par certains de ses membres ou des proches. Et le thème de la désobéissance non violente revient régulièrement dans le cours de mes chroniques ou dans nos débats hors antenne.
Aussi me semble-t-il opportun de signaler le bouquin de Xavier Renou qui porte en sous-titre : à l’usage de ceux qui veulent vraiment changer le monde.
Car il faut en finir avec le sentiment d’impuissance qui nous habite…
Car il s’agit de gagner. Mais on ne gagnera pas seuls : nous, les libertaires, il paraît que nous sommes actuellement du côté des minoritaires de la minorité.
Il s’agit donc, d’abord, de mettre l’opinion publique de notre côté, de gagner sa sympathie. Or, d’une façon générale, le grand public n’aime pas la casse pour la casse et la destruction pour la destruction ; il craint pour sa sécurité, pour ses biens même modestes, pour sa voiture qui risque de brûler, etc. : il prend facilement peur devant les violences… et bascule alors dans le camp de nos adversaires.
Il s’agit donc de mettre en place des actions qui auront plutôt sa sympathie afin qu’il se retourne contre nos adversaires. Par ailleurs, il s’agit aussi de diviser l’autre camp. Oui, c’est possible !
Voici quelques recommandations pêchées, presque au hasard, avant l’action :
– Avoir une pensée stratégique avec des objectifs clairs, précis, atteignables,
et déclinés par étapes, autrement dit avoir une « pédagogie de l’action ».
– Se méfier du goût de la « réunionnite », prévenir les compétitions entre les différents « égos » des militants ; réduire les effets de la domination ; refuser le sectarisme et la pureté révolutionnaire, etc.
– Renoncer à la violence car elle est souvent contre-productive par ses effets pervers : se demander par exemple ce que l’on gagne à affronter violemment la police. Et se dire que la violence, de par sa logique, va exclure les militants les plus faibles, les plus vieux, va favoriser une mentalité viriliste, sexiste, voire militariste, etc.
Mais il faut convenir qu’il y a des « zones grises » entre la violence et la non-violence, et qu’il faut en discuter avant l’action.
Il y a − ou il y avait − ce que l’on appelait l’École de guerre. Eh bien, il s’agit maintenant d’étudier et de mettre en pratique la désobéissance civile et l’action non violente.
Et ce, en abandonnant ce que Xavier Renou nomme une pensée magique :
C’est-à-dire une pratique qui relève de l’automatisme, du réflexe conditionné, qui ne sait plus poser la question de l’efficacité, alors qu’on a besoin d’une pensée pour explorer de nouveaux chemins, etc.
Je passerai sur l’arsenal de recommandations avant l’action, pendant l’action, après l’action. Je vous assure que tout est détaillé :
Il s’agit du repérage des lieux de l’action, de l’information, du scénario, du matériel, du budget, de l’aspect juridique, de la sécurité des activistes, de la communication, de la médiatisation, de la répression éventuelle, des contacts avec la police, avec l’adversaire, de la garde-à-vue, des sanctions, etc.
Et, à la fin, il ne faudra pas oublier que l’on peut prendre du plaisir dans ce genre d’action : car nous ne sommes pas pour autant masochistes.
André Bernard, chronique du 25 février 2010 dans l’émission « Achaïra », du cercle libertaire Jean-Barrué, sur la radio associative bordelaise la Clé des ondes.